J’ai une folle envie de marcher aujourd’hui. Quoique aujourd’hui est assez ironique, car l’envie me vient assez régulièrement, pour ainsi dire tout le temps. Je quitte alors les quartiers des dortoirs. En sortant de la chambre, je m'arrête un instant devant le miroir. Je fais la moue avant de jeter un regard vers la fenêtre traversée par des rayons de soleil bien chaud. Evitons de mourir de chaud. Cependant je prends un chapeau typique et ainsi que ma gourde accrochée à la porte. Je sors enfin de la pièce, mes éperons tintant au fur et à mesure que je m'approchais de la sortie tout en ayant profiter pour remplir ma gourde qui se balance en bandoulière au niveau de ma taille.

Je passe les portes des dortoirs, en direction de l’artère principale du pensionnat. J'ai très peu d'affaires sur moi, et je compte pour une fois, honorer le repas du midi, que je saute de plus en plus souvent dorénavant. Pas pour ma ligne, je suis assez mince comme ça et je n'ai aucunement de passer pour une morte-vivante. Les hommes préfèrent à la bonne chair et tant mieux, j'évite les tours de séduction à deux cents. Mais cependant je veux aussi éviter les regards pesant de ces mêmes personnes, plein de dégoût face à mon physique qui est déjà assez atypique comme cela. Oh ne vous inquiétez pas, je me contrefous carrément du regard des autres mais les commentaires et murmures désobligeants ont tendance à faire voler mon poing par ci par là.

Une ou deux ruelles plus loin, je débouche dans les jardins du pensionnat. Il y a très peu de monde malgré qu’il ne soit pas très tard encore. Ce n’est pas plus mal, au moins je vais passer inaperçue. Mais pourquoi faire ? Mes cours à l’académie se passent bien et demeurent barbant au possible bien que les enseignants ne comprennent pas mon comportement laxiste et me voir pour autant réussir. J'émets un léger rire et regarde autour de moi. J’espérais en mon fort intérieur, à ne pas avoir à rencontrer un de mes camarades. Je les voyais trop souvent pour en plus passer mon temps libre à flâner avec eux.

Il n’y a quasiment pas de vent, et ça me manque. Je vais m’asseoir en bordure des parterres de fleurs, savourant les odeurs qui émanent de ce lieu. Je dois sacrement détonner. Moi, une Tulip qui s'amuse à humeur les fleurs au lieu de gueuler sur une pauvre victime. Je retire mon chapeau alors la lumière du jour chauffe chaque parcelle de ma peau hâlée. Prenant un banc de libre, je m’assois en tailleur. Je suis fin bien. Tiens un nuage de beau temps avance seul dans la mer céleste. Je soupire ne pensant à plus rien.

Je suis perdue dans mes pensées sans trop savoir vers quoi je dérive, mais lentement, le reste du monde n’existe plus. Plus rien autour de moi n’a un sens, une image, une identité. J’ai les yeux fixés sur un point précis, mais je ne le vois pas. Oui, je suis perdue dans mes pensées, faisant fi du monde extérieur, lequel me rend la pareille continuant son flux sans moi. A quoi je pense ? A des myriades de choses, allant de mes envies, à mes désirs, en passant sur mes perspectives d’avenir. Oui il m'arrive d'être philosophe même si cela est bien rare chez moi.

Une voix lointaine, mais distincte, vient me percer les tympans comme un coup de tonnerre. Clignant des yeux bêtement, je me redresse nonchalamment, constatant que je me suis légèrement affalée sur le banc. Je lève mon minois inexpressif vers le trublion qui m’a sortie de ma torpeur. Mais je n'eus le temps de répliquer car un autre élève m'aborde violemment. Il doit être quelque plus âgé que moi. Hurlant que je suis une enquiquineuse de première catégorie, l'incongru m'assène une claque phénoménale. Je sens mon dos percuter le bois. Un cri de douleur s'échappe de mes lèvres. Mais quel petit salopard ! Je me relève tant bien que mal en me massant le dos et toisant le petit imbécile qui a osé faire ça. Ok je suis une garce mais me déranger pendant mon instant de paix est un crime. Maintenant, le castrage est annoncé même si je risque de prendre pour mon grade... Mais cela je ne l'avouerais jamais.

« - Tu es mal tombé mon coco !»

Code by NatK.

Alors que ce satané péteux me nargue avec son sourire ironique qui semble signifier qu'il m'attend de pied et ferme et qu'il n'est nullement effrayé par ma menace assassine, un fracas retentit derrière lui et tous les deux écarquillons les yeux en voyant la cheftaine des Tulips arriver en trombe tel un bison chargeant droit devant. Mes poings se desserent pendant que l'autre blaireau à couille molle paraît déstabilisé par l'apparition soudaine de Marilyn Brandon, cheftaine des Tulips, ma cheftaine. Oui, je le connais mais je n'ai pas encore eu l'occasion de la rencontrer. Hé bah, le hasard fait fichtrement bien les choses. J'esquisse un sourire et éclate de rire face à la réaction du malotru et de l'état de Marilyn avec des tiges des feuilles partout sur elle. Je me relève alors que le mec est ahuri par la scène. Toutes les deux nous l'ignorons un instant le temps que je me présente :

« - Johanne Skyfire. Appelle-moi comme tu veux.»

Puis dès qu'elle me rétorque qu'il faut que j'attaque, Monsieur tilte enfin qu'il se retrouve en hotdog entre nous deux. Il me toise comme si son regard désire m'insulter de lâche. Je souris et je hausse les épaule avant de prendre un élan brusque, feintant un coup aux bijoux de famille. Le réflexe de tout homme était soit de stopper la jambe de l'adversaire soit de se protéger. Oh, je ne suis pas une experte juste l'instinct et l'habitude de combattre dans les ruelles qui me dicte comment agir. Donc au lieu du genou et ce fut mon poing qui frappe, pile sur la joue gauche du bonhomme. Je n'ai pas encore assez de force pour l'enovyer valdinguer mais il bascule sur le côté. J'en profite pour le pousser du pied. Je le presse avec fort pour qu'il se retrouve sur le dos et je pose une bonne partie de mon poids sur ses précieuses. Je me redresse comme si de rien n'était tout en insistant sur le talon qui s'amuse à pivoter légèrement pour le castrer. Je m'adresse alors à ma cheftaine :


« - Contente d'avoir l'honneur de te rencontrer. Excuse Couille molle. Il ne savait pas ce qu'il faisait.»

Code by NatK.

Je ne sais pas cela est du à la petite leçon que je lui ai envoyé à la tronche ou à la présence de la cheftaine des Tulips qui a fait comprendre à l'énergumène qu'il faut mieux partir loin d'ici et ne plus jamais montrer son visage devant nous. Il détale tel un coyote, la queue entre les jambes. Je sens le réflexe de prendre un colt et l'envie irrépressible de vouloir jouer à la chasse à l'homme et de tirer sur lui ou plutôt de le manquer de peu pour accélérer sa course. Un esprit malsain moi ? Oui. Faut pas me chercher des noises. Je croise les bras puis grimace. La douleur monte brusquement, l'adrénaline ne faisant plus effet. J'émets un grognement peu féminin et soupire. Me faire avoir comme ça et être marquée de manière aussi visible me dérange et va me gêner pour un temps. L'envie de massacrer ce fanfaron revient à nouveau dans mes pensées alors que mon pied droit bat le sol de manière impatiente. Je n'ai pas le temps de râler davantage car un regard, celui de Marilyn pèse sur moi. Je tourne mes mirettes vers elle et me pose une question dérangeante, que j'élude en balayant l'air d'une main. J'ai failli à mon devoir mais je ne m'excuse pas pour autant.

« - Des contretemps par ci par là comme celui que tu viens de voir.»

Sans que je puisse agir, la jeune femme au cache-oeil agrippe mon menton et fait pivoter mon visage pour mieux regarder l'endroit encore irrité causé par la claque. Je me mords doucement la lèvre inférieure gênée par ce geste. Je suis loin d'être une jouvencelle effarouchée mais le souvenir qu'elle ait pu me voir être ridiculisée et malmenée par un mec me répugne. J'hoche juste de la tête quand elle me rassure que je n'aurais pas de séquelle. Heureusement. J'évite de faire ma bravache et m'écarte avec douceur de Marilyn sans rien dire et j’acquiesce de nouveau.

"- Ouais, mais on va y remédier en tant que Tulips."

Puis je me dirige vers le banc sur lequel je me suis assise et y retrouve mon sac et ma gourde. Je sors un mouchoir dans le premier et ouvre ensuite la suivante pour y verser un peu d'eau sur le tissu que je passe ensuite sur ma joue. Je ne peux m'empêcher de soupirer de bien-être. Rah le pied ! Puis je croise le regard de Marilyn :

"- Tu as des projets pour aujourd'hui ? Ou veux-tu me passer à la casserole et voir si je suis digne d'être une Tulip ?"

Code by NatK.